Les Nuits Photographiques d'Essaouira

Victorine Alisse / J.S. Saia, invités des Nuits Photographiques d’Essaouira 2022

VICTORINE ALISSE

Après une formation en relations internationales et action humanitaire, Victorine Alisse se consacre à la photographie. Son approche documentaire l’amène à traiter de sujets sociétaux et environnementaux. Mais c’est avant tout, la rencontre avec l’autre qui nourrit son travail. Petite-fille d’agriculteur, elle cherche à questionner les visages de l’agriculture d’aujourd’hui en France, puis en Israël et dans les territoires palestiniens. Elle s’intéresse également aux nouvelles formes narratives en combinant textes et images avec la série « Au grand air », récompensée par le Prix Caritas Photo sociale en 2021. Membre du collectif Hors Format, elle collabore également avec la presse.

JS SAIA

Originaire de Suisse et ambassadeur au sein de l’association La Cloche depuis cinq ans, JS a notamment participé à la construction de la Form’action La Cloche « Aller Vers ». Passionné par la photographie, celle-ci lui permet de témoigner de son vécu afin de changer le regard que porte la société sur le monde de la rue et sortir de l’ombre tous ceux qui y vivent. En 2021, il est co-lauréat du Prix Caritas Photo Sociale avec “Au grand air”.

Au grand air

JS, bénévole au sein de La Cloche et Victorine, photographe, se sont rencontrés autour d’un café grâce à l’association La Cloche dédiée à la création de lien social et au changement de regard sur la vie à la rue. De cette rencontre est née l’envie de réaliser un projet photographique construit ensemble.

Victorine commence par suivre JS dans les lieux qui font partie de son histoire ; du parc de Bercy à Paris où il est arrivé en 2015 au bois de Vincennes où il vit depuis. “J’ai voulu que tu imagines par toi-même ce que j’ai pu vivre à certains endroits. J’ai tenté de te faire comprendre ce que signifie être à la place de”, confie JS.

Une relation se tisse peu à peu mais très vite, une question se pose : comment rendre compte d’une réalité qui n’est pas la sienne ? Ils décident alors de collaborer en prenant chacun l’appareil photo avec une contrainte posée par JS ; celle de ne pas prendre de photographies “clichées” du monde de la rue. On découvre dans certaines de ses photographies, une nature quasi omniprésente, une forme de douceur qui contraste avec certains de ses écrits dans lesquels on peut ressentir une colère. “C’est un cri, un “au secours” pour toutes les personnes qui vivent la solitude, l’isolement et la lenteur des démarches administratives”, exprime JS.

À travers cette série, on ne s’attarde volontairement pas sur les détails de la vie de JS pour se concentrer sur la rencontre de deux perceptions issues de deux modes de vie différents. Chaque prise de vue est suivie d’un échange sans tabou, plus intime et naturel autour de leurs photographies. Celles-ci deviennent un moyen de communiquer en soi, plus direct, plus personnel, sans artifices. “Ce projet m’a permis d’exprimer ma colère”, raconte JS. Sur les tirages, l’écriture devient nécessaire. Ils y racontent et confrontent leurs regards qui ressemblent davantage à un dialogue. Ces photographies deviennent une tentative de rompre les préjugés posés sur un mode de vie souvent considéré comme marginal et impensable.

“Au grand air” devient une discussion photographique qui n’essaie pas de parler du “monde de la rue”, mais plutôt de faire découvrir une facette poétique de ce mode de vie, qui n’empêche pas la solitude et l’isolement. “On est tranquille ici, il y a une vraie vie dans le bois”, conclut JS.